Un exemple d’archéologie spéculative : comment les archéologues, trois mille ans après la disparition de notre civilisation, interpréteront-ils ce document d’une valeur inestimable ? – Un… (Mais lisez la suite pour voir si vous trouverez la clé de l’énigme).
Je dédie cet article mi-sérieux, mi-humoristique à Jean-Loïc Le Quellec, grand déchiffreur d’énigmes sahariennes, auteur d’une série incroyable de livres passionnants sur nos ancêtres et l’interprétation des traces qu’ils nous ont laissées.
Je paie aussi ma dette au Musée du Malgré Tout : si j’ai eu l’idée de réinterpréter un document aussi crucial que celui-ci, c’est de l’exposition Futur antérieur que m’est venue cette inspiration un peu tordue, il faut bien l’avouer.
Archéologie spéculative : un document religieux d’une valeur inestimable
Nous sommes en l’an 3.000 d’une nouvelle ère. Les traces de notre civilisation disparue se font de plus en plus rares. D’autant que, contrairement aux Grecs antiques, aux Romains de l’époque impériale ou aux Mésopotamiens de l’ère des cités-états, nos traces écrites sont terriblement fragiles.
Un précieux document, datant de la fin de la civilisation dite, par ironie, techno-industrielle, révèle des précisions inédites sur les croyances de cette peuplade dont on ne sait à peu près rien. Le déchiffrage de ce message plurimillénaire constitue un des apports majeurs de l’archéologie et de la paléographie modernes.
Lieu et circonstances de la découverte
Ce document exceptionnel a été découvert dans une cavité souterraine. Il s’agit d’une grotte naturelle, manifestement aménagée : on y a trouvé du mobilier métallique, contenant un système de câblage complexe. Si nous ne savions pas à quel point ces populations étaient arriérées, nous aurions pu penser à du matériel électrique. Ces prêtres — car, à n’en point douter, il s’agit d’un lieu de culte — ont-ils copié, sans les comprendre, les structures monumentales, voire proto-industrielles, d’une civilisation plus avancée ? À ce stade de nos connaissances, nous ne pouvons qu’émettre des hypothèses.
Matérialité du support
Le matériau utilisé pour consigner ce message est un dérivé du bois. L’examen au Carbone 14 a démontré qu’il datait bien de 3.000 ans (+- 50) avant notre ère. La spectrométrie de masse confirme qu’il contient une proportion significative de cellulose.
Son état de conservation exceptionnel est dû à des circonstances non moins exceptionnelles. Les fouilleurs l’ont trouvé à l’intérieur d’un contenant de matière plastique, sorte d’urne votive, doublée à l’intérieur, d’un voile d’une matière plastique plus fine. Ces deux contenants semblent provenir de la fusion d’une matière minérale que nous n’avons pas encore identifiée à ce stade.
Interprétation du message
La tâche la plus complexe et la plus hasardeuse de l’archéologie est, bien entendu, d’interpréter ce que nous transmet ce message lointain. Nos meilleurs paléographes se sont relayés sur ce texte et son illustration et voici leurs conclusions :
“De l’orientation des silhouettes humanoïdes et des autres figures représentées sur cette inscription, les paléographes ont conclu qu’elle devait se lire de droite à gauche. Certains spécialistes moyen-orientaux ont contesté cette hypothèse, mais leur interprétation a été rejetée comme relevant davantage de la revendication identitaire que comme apport scientifique.
Les spécialistes n’ont malheureusement pas encore déchiffré le texte de cette inscription. Mais, les figures illustrées donnent toutefois de sérieux indices sur le contexte et la signification de ce précieux document archéologique.
La première figure humanoïde à l’extrême-gauche de la première ligne décrit un personnage prolongé par trois flèches, orienté vers la droite et vers le haut. Nul doute que le chiffre trois ait une signification religieuse profonde pour ces populations. Ni que le côté droit et l’orientation vers le haut des flèches soient propices à communiquer avec une divinité ou un ensemble de divinités siégeant dans un monde supérieur !’
Les illustrations dans l’encadré expriment le voyage d’un défunt vers un centre cultuel ou funéraire. En effet, la première figure parallélépipédique à gauche de l’encadré représente une barge. Ce vaisseau primitif, sans voile ni rameurs, devait se laisser flotter sur les eaux d’un fleuve encore non identifié. Le signe “+” à droite de la barge signifie sa destination : transporter la momie d’un roi ou d’un haut dignitaire vers sa dernière demeure. Celle-ci est représentée par une urne funéraire à couvercle. Notez également la présence d’une flèche, bizarrement courbée — peut-être pour symboliser le chemin hasardeux de la créature vers son créateur. Car ici aussi, la flèche indique le haut, le royaume habité par les dieux inconnus. Tandis que les deux pieds, de chaque côté du vaisseau funéraire, expriment sûrement son attachement à la terre et probablement à un monde chtonien.
La ligne suivante commence par la représentation d’une coupe ou d’un chaudron accompagné d’une fourche ou de la représentation d’un trident. Ceux-ci sont de proportions monumentales comparées à la taille de la figure humanoïde suivante. Celle-ci dépose, dans ce qui semble un brasero, un objet inconnu, peut-être une prière votive, destinée à monter sous forme de fumée vers le trône des divinités.
Le triangle fléché avec l’inscription “21” au centre renverrait au nombre de jours que compterait un cycle complet de dépôt, transport et offrande à la divinité. Certains interprètes ont émis l’hypothèse d’un cycle de lunes, mais, eu égard aux pauvres habiletés nautiques de ces populations, cette interprétation a été écartée comme abusive par l’ensemble de la communauté scientifique.
Enfin, le texte de la dernière ligne, au bas de ce document énigmatique, n’a pu être déchiffré non plus. Mais les paléographes y discernent la présence de deux systèmes linguistiques différents : peut-être s’agit-il d’un culte commun à deux civilisations voisines. Ou la civilisation la plus récente a pu conserver, dans son système d’écriture, des traces d’une civilisation plus ancienne.”
Archéologie spéculative : la solution de l’énigme
Et vous ? Avez-vous trouvé le fin mot de l’énigme ? Avez-vous déchiffré le mystérieux document ?
Je vous livre la clé : il s’agit d’un emballage de boudin de Noël distribué dans un supermarché belge (un boudin blanc à la mandarine). Les inscriptions mystérieuses sont les instructions de recyclage de ce lot particulier, emballé sous plastique sur un support de carton. C’est au dos de ce dernier qu’apparaissent ces inscriptions qui n’ont rien de mystérieux. La grotte aménagée est un abri antiatomique (oui, il y en a encore). L’urne votive doublée d’un voile est une corbeille de bureau dans laquelle a été inséré un sac poubelle.
Ce petit tour de passe-passe pseudoscientifique avait pour but d’illustrer les résultats aberrants de certaines interprétations abusives des documents de la préhistoire ou de l’antiquité.
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