Quels sont les points communs entre les méthodes efficaces pour apprendre et le fait d’étudier avec le mindmapping ? En quoi les cartes mentales correspondent-elles aux principes d’étude confirmés par les neurosciences ?
Le point de départ : le MOOC « Apprendre à apprendre«
Ce texte est l’adaptation d’un travail réalisé en anglais pour le MOOC « Learning How to Learn » sur Coursera. Cela peut sembler étrange que quelqu’un qui organise divers ateliers, conférences et formations sur le thème « Apprendre à apprendre » s’inscrive à un tel MOOC.
En réalité, mon objectif était multiple :
- voir si les principes proposés dans ce MOOC correspondait peu ou prou à ceux que je prône
- formaliser mes propres idées, les mettre en ordre, en vue d’écrire un livre sur le sujet
- apprendre de nouvelles choses, mettre mes connaissances à jour
Je n’ai pas été déçu. Tout d’abord, le MOOC conçu par les Dr. Barbara Oakley et Terrence Sejnowski pour Coursera était extrêmement agréable à suivre, mais surtout, il prenait en compte les dernières découvertes des neurosciences cognitives. Le tout, de façon très abordable et même amusante (les métaphores avec les zombies ou les flippers, particulièrement efficaces…).
Ensuite, quelques 85 à 90 % du contenu du cours correspondaient à ce que je présente dans mes formations. Les pourcents restants étant des choses nouvelles pour moi ou présentées sous un angle nouveau.
Pourquoi la comparaison entre apprendre à apprendre et le mindmapping ?
Pour clôturer la formation, nous devions rendre deux travaux. Le second devait présenter et expliquer au moins trois sujets abordés au cours des quatre semaines. Le support et l’angle de vue étaient laissés libres, à l’appréciation de l’apprenant.
Au cours de ces quatre semaines, je ne compte pas les fois où je me suis dit : « ceci correspond parfaitement à ce que je fais dans mes ateliers ou dans mes accompagnements individuels » ou « ça colle exactement avec les principes du mindmapping ».
L’idée de mon travail était toute trouvée :
Etudier avec le mindmapping !
La consigne de l’exercice était de présenter au moins 3 points vus pendant la formation. En comparant avec le mindmapping, j’ai trouvé 7 points communs :
- deux modes de pensée : concentrée et diffuse
- l’importance des rappels (recall)
- la mémoire spatiale
- les images
- les mots-clés
- le chunking
- les métaphores dont les métaphores visuelles
1. Deux modes de pensée : concentrée et diffuse
a) La pensée concentrée
La pensée concentrée est celle qu’on utilise le plus souvent pendant l’exécution d’une tâche comme mémoriser, comprendre, analyser :
- on est « concentré » sur son sujet
- on analyse les détails
- on passe d’un article à l’autre en mode séquentiel
Cela correspond au sujet en mind mapping : c’est-à-dire, un mot-clés, associé ou non à une image, sur une portion de branche. Chaque sujet (topic en anglais) est un détail de l’ensemble sur lequel l’attention se focalise. C’est un détail, un point focal sur lequel la pensée se concentre.
b) La pensée diffuse
Mais, une mindmap, c’est un système hiérarchisé, constitué de liens entre les idées, qui organise l’information sur une feuille de papier ou sur l’écran d’un logiciel ou d’une application.
C’est une façon unique de visualiser l’information d’une manière globale, d’un seul coup d’oeil. Une vision globale rendue possible par le format de page en paysage (ou à l’italienne) qui correspond mieux à notre angle de vue latéral que la page en format portrait.
Et qui correspond davantage au mode de pensée diffuse, laquelle envisage les éléments avec plus de hauteur, de manière plus lâche, ce qui permet une vue globale, mais aussi plus de créativité par les associations libres qui naissent plus facilement lorsque nous lâchons la bride de la concentration.
2. L’importance des rappels
Les auteurs de ce MOOC affirment qu’il est important, lorsqu’on étudie, de tenter de se rappeler immédiatement ce qu’on vient d’étudier. De quitter la page des yeux et de se répéter mentalement ou à haute voix, ce qu’on vient d’étudier.
Cela renforce la mémorisation et évite le phénomène de l’illusion de compétence : celle-ci résulte d’une impression de comprendre et donc de connaître, dès la première lecture. En réalité, si nous comprenons, nous retenons très peu après une première lecture. Et la désillusion risque d’être cuisante lors de l’examen…
C’est aussi pourquoi il est important de mettre ses notes à jour le soir-même, après avoir eu un cours : les idées sont encore fraîches dans notre mémoire et on peut identifier facilement ce qui n’a pas été bien compris.
On peut associer ces rappels à la pratique d’une mindmap. Après avoir lu une portion de la matière, fermez les yeux, tâcher de vous rappeler les éléments que vous venez de lire. Et ensuite, notez-les immédiatement sous forme de mindmap.
Les deux procédés se renforcent alors mutuellement : non seulement vous mémorisez mieux la matière, mais vous la structurez en même temps…
3. La mémoire spatiale
Nous éprouvons beaucoup de peine à nous souvenir des noms et des chiffres. Mais nous avons une fantastique mémoire spatiale. C’est le principe même de la technique du palais de mémoire. En stockant une image dans un lieu précis – de préférence, une pièce de notre maison – et en l’associant avec des images qui suscitent des émotions, nous parvenons à mieux nous souvenir.
C’est exactement pareil sur une mindmap. Regardez l’illustration ci-dessous : c’est la structure d’une mindmap, sans texte, ni autre illustration que les branches, les limites (ou encore nuages) et les relations entre certaines branches.
On peut constater que la mindmap est une structure fortement hiérarchisée dans l’espace. Tout y est à un endroit précis. Ce qui se trouve sur la branche en haut à droite est distinct de se qui est attaché à la branche en bas à gauche.
La position des éléments sur la page et sur les branches nous permet de mieux nous les rappeler. On peut affirmer sans exagération qu’une mindmap est un palais de mémoire sur papier.
4. Les images et le pouvoir des émotions
Si les mots et les chiffres s’adressent à notre cerveau rationnel, les images, elles, mobilisent nos émotions. En cela, elles sont très puissantes pour nous aider à mémoriser. La mémoire à long terme est intimement liée aux émotions. Les deux domaines – émotions et mémoire – sont traités par la même partie de notre cerveau, le système limbique, beaucoup plus ancien que notre cortex cérébral.
Nous mémorisons aussi beaucoup plus facilement les expériences sensorielles que des notions abstraites comme les mots ou les nombres. Associer ces derniers avec des éléments sensoriels renforce notre mémorisation.
Il n’y a pas de bonne mindmap sans images et sans pictogrammes. Ce sont elles qui font passer rapidement les notions apprises de notre mémoire de travail à notre mémoire à long terme via l’hippocampe. Plus l’image est drôle ou choquante, plus elle renforce la mémorisation : car l’émotion associée est d’autant plus forte.
5. Les mots-clés et la surcharge cognitive
Les mots signifiants d’un texte constituent environ 10 à 15 % du total. S’encombrer l’esprit avec 85 à 90 % de mots non-signifiants – qui ne reflètent pas les idées principales du texte – est un luxe que peu d’étudiants peuvent s’offrir…
Il vaut donc mieux utiliser des mots-clés dans les mindmaps que vous utilisez pour étudier. Vous mémoriserez plus facilement et avec moins d’efforts 35 mots-clés relatifs à un texte que l’intégralité de celui-ci.
En outre, lorsque vous résumez un texte sous forme de mindmap, vous en effectuez déjà une synthèse, ce qui concourt aussi à la compréhension et à la mémorisation (essayez de synthétiser quelque chose que vous ne comprenez pas…).
6. Le chunking : une façon efficace de découper la matière
Le chunking consiste à découper la matière en portions plus facilement mémorisables. Notre mémoire de travail est terriblement limitée. Vouloir retenir trop d’informations en une seule fois relève de la gageure.
Dans le travail de chunking, il ne suffit pas de découper la matière, mais bien d’associer des éléments secondaires à un élément principal qui résume le tout.
C’est exactement ce qu’on fait quand on ajoute des éléments secondaires à une branche principale. La branche principale de la carte mentale est donc l’élément principal du chunk, tandis que les branches secondaires, qui portent les éléments secondaires de la matière, y sont associées. De cette façon, lorsque j’évoque dans mon esprit l’idée principale qui figure sur une branche, je peux me souvenir plus facilement des éléments secondaires qui y sont associés.
Un exemple pour mieux comprendre : la branche « Pensée » de ma mindmap. Le sujet « Pensée » constitue l’élément principal du « chunk », tandis que les sous-branches « concentrée », diffuse, détails, vision globale, peintre, viennent la compléter. En évoquant la branche « Pensée » je peux plus facilement me rappeler les éléments associés dans les sous-branches.
Une autre façon d’illustrer cette notion de chunking dans une mindmap est d’utiliser le « drill down » : c’est à dire la capacité de certains logiciels de mindmapping comme XMind ou Mindomo, de n’afficher qu’une partie de la mindmap à la fois. Cela permet de se concentrer sur une partie de la matière, celle qu’on veut étudier et pas une autre. Ci-dessous, le résultat d’un drill down sur la branche Mémoire spatiale avec Mindomo.
7. Les métaphores, dont les métaphores visuelles
Les métaphores sont des façons détournées d’évoquer une réalité. Par exemple, pour se souvenir de la capitale de l’Argentine, notre fille y a associé l’image d’un Kinder Bueno : de cette façon, elle n’oublie jamais que la capitale argentine est Buenos Aires…
Mais les métaphores peuvent aussi être visuelles. Par exemple, pour symboliser la mémoire spatiale dans ma mindmap j’ai utilisé une boule argentée dans laquelle se reflètent des éléments d’une ville. Pour moi, cette réflexion d’un paysage urbain dans une sphère est synonyme de mémoire spatiale. Ce ne l’est sans doute que pour moi, mais comme il s’agit d’une mindmap pour étudier, et non pas pour communiquer à d’autres personnes, ce n’est pas un problème : j’utilise alors des éléments qui me touchent, me « parlent ».
Les mots-images sont aussi des types de métaphores visuelles frappantes qui aident à retenir. En voici quelques exemples :
Conclusion
J’espère avoir démontré que de nombreux éléments du MOOC Learning how to learn sont également présents dans les méthodes d’étude avec le mindmapping.
Personnellement, dans les ateliers que j’anime ou dans l’accompagnement d’étudiants, je mélange plusieurs techniques : mindmapping, concept mapping, flashcards et autres techniques de mémorisation, etc.
Mais le mindmapping reste sans conteste un outil extrêmement souple et efficace pour étudier quelque matière que ce soit. Les éléments de ce MOOC aident à comprendre pourquoi…
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